Entretien avec Julie Andrieu

Lenaic 2014-11-19 0

Connue pour ses ANDRIEU JULIEémissions de voyage et de cuisine depuis plusieurs années à la télévision, Julie Andrieu plait au public par sa simplicité et sa spontanéité.

Son métier me passionne, forcément. Voyager partout dans le monde pour faire découvrir des cultures et des paysages aux téléspectateurs, ça semble être le boulot de rêve ! J’ai tenu à rencontrer Julie pour parler voyage. Difficile d’accorder nos agendas, mais on est parvenu à trouver un moment pour que je lui pose quelques questions. Et, en professionnelle des médias, elle détaille ses réponses, argumente, synthétise. Extraits :

 

Comment est venue votre passion pour le voyage ?

Disons que ca a toujours été. J’ai toujours aimé voyager, aller voir ce qui se passe ailleurs. On voyageait déjà en famille, puis je suis partie après mon bac, à l’âge de 17 ans, pour le Népal d’abord, puis j’ai continué en Inde et au Sri Lanka. J’ai passé trois mois à voyager seule, parce’que je souhaitais voyager seule et que j’ai toujours été assez solitaire. Et puis de toute façon à cet âge là il n’y avait pas grand monde qui était prêt à me suivre ! C’était un voyage un peu initiatique, d’autant qu’il n’y avait pas de téléphone portable ni d’ordinateur, donc c’était un vrai voyage, on décrochait vraiment !

 

Quel est votre mode de voyage, au niveau hébergement, transport, etc..?

Je voyageais principalement en mode sac à dos. Désormais, je voyage moins, et je ne voyage plus trop en mode routard. Il faut aussi plus de temps pour ca ! Hormis en Inde, où je tenais à emmener mon mari pour notre voyage de noces car c’est un pays qui est important pour moi, et où on a pris à la fois une voiture et le train. Mais c’est vrai qu’on bourlingue moins aujourd’hui.

 

Qu’aimez-vous particulièrement dans le voyage ? La capacité d’adaptation, les rencontres, la quête de soi-même..?

Oh, il y a un peu de ça, forcément, mais je pense que c’est surtout d’aller voir comment ça se passe ailleurs, de se frotter à l’autre, de se laisser un peu bousculer par ce qui vous est différent. C’est plutôt une ivresse de liberté et pour relativiser un peu ce qui m’entoure, peut-être…

 

Pourriez-vous être heureuse sans voyager ?

Euh, non je ne pense pas. Je pense que je n’en serai pas capable. C’est profondément ancré dans mon mode de vie, même si aujourd’hui ce sont surtout des voyages en France, mais qui sont très fréquents. Mais non, je ne pourrais pas rester, surtout à Paris, ça me rendrait dingue !

 

Y a t-il une religion ou un peuple qui vous attire particulièrement ?

Pas un peuple en particulier, mais c’est vrai que je suis très sensible à l’Inde, à leur spiritualité, à leur mode de vie. Même si je me considère athée, je suis d’autant plus intéressée par les religions, par le sens du sacré chez l’autre. Je suis plus sensible à l’Asie peut-être et à cette notion beaucoup plus cyclique du temps que la notre, qui est construite sur une idée de progrès. Je trouve que c’est une approche qui est très apaisante notamment parce qu’on n’est pas dans une appréhension de la mort et que je trouve que ça pèse beaucoup dans notre société. Après il y a aussi cette idée de la communauté qui est très ancrée en Asie, et en Afrique aussi d’ailleurs. Il y a plus cette notion de groupe, de société. On n’est loin de l’individualisme forcené du monde occidental. Ca m’a toujours touchée, notamment au Japon, que j’aime beaucoup. Il y a un respect de l’autre, de la nature, de la communauté qui est forcément plein d’enseignements pour nous.

 

Je ne connais pas le Japon, mais il n’y a peut-être pas autant de spiritualité et d’esprit de communauté dans ce pays. Si ?

Si, je trouve que si. C’est-à-dire que l’individu en tant que tel n’a pas d’importance. Ce qui importe c’est le groupe, c’est l’ordre. C’est loin de nos sociétés méditerranéennes fondées sur le « je pense donc je suis », très individualistes. Il y a un respect de la vie, de la cité, et plus largement de l’ordre de la société, qui est assez émouvant.

 

andrieu voyage

Etes-vous optimiste sur l’avenir de l’humanité ?

Et bien… oui, disons qu’on peut difficilement vivre sans être optimiste. C’est vrai qu’on a tous des angoisses, mais quand on se retourne vers le passé, on se rend compte que les sociétés étaient beaucoup plus violentes qu’aujourd’hui. Il y avait un sens de la famille, de la communauté et du groupe qui étaient plus développé, mais aujourd’hui on est dans des sociétés où on ne peut pas faire absolument n’importe quoi, sauf peut-être en Afrique. On a quand même réussi à aller vers une forme de démocratie qui est rassurante, mais on ne peut pas contenir tous les excès, et surtout on ne peut pas instaurer une seule entité. Ca serait une grave erreur et je pense que voyager nous aide à le comprendre. Après, le monde a toujours été de l’avant, avec ses différences, avec ses antinomies, ses conflits et ses violences qui font partie de nous. Donc je crois qu’il ne faut pas prendre au pied de la lettre tout ce dont nous abreuvent les médias, et dont nous sommes d’ailleurs friands, et essayer de relativiser et de se tourner vers le positif, l’équilibre. Et on sait que le monde en recèle.

 

Est-ce que vous voyez justement une différence dans le traitement de la violence de la part des médias, entre l’occident et l’Asie ou l’Afrique ?

Je pense que c’est très différent car chez nous on traque plutôt l’abus de pouvoir, alors que là-bas le pouvoir est considéré comme un ciment de la société ! Paradoxalement, les investissements en Chine n’ont jamais été aussi prolifiques qu’après les événements sur la place Tian’ Anmen, car le gouvernement a lancé un message qui voulait dire qu’il tient son peuple ! Ce qui pour nous était très choquant, parce que toute notre société démocratique est fondée sur les libertés individuelles, pour eux c’était le contraire, c’était le message que l’ordre était rétabli ! L’usage de la violence peut s’avérer différent. Si la violence permet de rétablir l’ordre, et si elle permet de contenir les fauteurs de troubles qui peuvent être pour nous des gens qui souhaitent exprimer leur opinion, elle leur apparaît légitime. C’est très perturbant ! Je ne juge pas, j’essaye juste de remettre les choses dans leur contexte. C’est important de le savoir pour ne pas juger à tort et à travers.

 

  J’ai beaucoup apprécié cet échange avec Julie, grâce à ses réponses intéressantes et spontanées. Je trouve son approche du monde très intéressante. Avec sa culture et son recul sur la société française, Julie capte les valeurs de chaque culture du monde. Elle nous fait réfléchir sur les fondements de notre propre société et des jugements que l’on émet sur les autres cultures. Merci encore Julie !

 

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